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Marieposte
19 décembre 2011

SUBLIME, ET SES SEMBLABLES.

J'inaugure une série de post, en lien avec un sujet qui ne cesse de heurter mon cortex. Le sujet ce serait: les Sublimes (qui nous (me) culpabiliseraient presque d'être un cow-boy, enfin, une cow-girl du Texas) dans la vie quotidienne.

Celles dont le Chic est l'essence, et la séduction perpétuelle involontaire, le moteur.

 

Imaginons une scène banale, du type: café matinal en terrasse, un dimanche matin.

Comme tout le monde tous les dimanches matin, de manière orthodoxe,  je me suis habillée en sunday wear, en l'occurence encore plus détendue que friday wear, lui même déjà bien bien relax. Le Moyen Testament dit "en décontract' sera le dimanche, pour rendre hommage au dépouillement vestimentaire de Dieu". Ah si, il dit ça le Moyen Testament, mais personne ne le sait car il n'en existe qu'un seul exemplaire, que j'ai, et sa réedition semble compromise, comme la terre compromise, oui, exactement. Mais je vous livrerai des extraits non expurgés, sympa. (Car la femme Sublime est un ravage universel.)

Donc, au café. Je viens de commettre bruit de succion (café brûlant) fort peu convenable, et je regarde alentour pour savoir si quelqu'un m'aurait entendue, des fois. Là, vision paralysante: une magna-nifique quinquagénaire, absolument d'origine (c'est notable dans ce siècle vendu au premier seringueur de Botox qui passe), et en train de s'adonner à la même activité que moi -buvage de café, pas succion triviale de tasse- mais, comment dire, je me sens, pfffiou, à cent mille lieues de ce résultat.

L'allure, la classe, le Chic. Pourquoi elle = le chic, et moi = pas-vraiment-tout-à-fait-voire-franchement-non?

S., (Sublime quinqua) a l'air de savoir se tenir. Moi aussi, je sais. Mais je ne m'y tiens pas. J'ai présentement la posture dite Texane, ie les jambes teeeellement écartées qu'on dirait que mes genoux ont juré de ne plus jamais vivre ensemble, genre même il y a un contrat sur le rapprochement de mes genoux, ie les coudes sur le dossier de la chaise, genre "le poids du monde est trooop lourd", nb: je ne crache pas par terre, comme une vraie texane (en revanche je machouille ma touillette, comme une vraie...rien).

Donc S. se tient au bord de son assise, toute en légèreté, avec ses deux jambes rangées sur le coté, accessoirement, négligemment, style "faut pas que je les oublie en partant".

S., loin de jouer les porte-manteaux, transcende sa tenue on ne peut plus simple.

Tiens c'est amusant, on pourrait être décrite de la même façon, sous cet angle-là: jean, chemise blanche, veste en cuir.

Tiens, c'est amusant, cela ne produit absolument pas le même effet.

S. semble avoir choisi un modèle de veste près du corps, du type seconde peau. Moi, lorsque je me cuire, c'est soit parce qu'il y a du vent, et que rien n'égale une peau d'animal mort pour s'en préserver, soit parce que j'ai cédé à l'appel du Wild Wild West qui hurle parfois en moi, et que cela signifie zéro maquillage (dans le grand ouest, à part le charbon, avec quoi se faire un smoky eye, hein?), style capillaire "descente de rodéo", pas de ceinture parce que nous, les texanes, on n'est pas des fiottes, et que ça entraverait le port du colt dans le froc. Une bête paire de boucles d'oreilles en turquoise pour sauver ma dé-mise? Non, non, même pas.

S. est dans l'économie de gestes. Moi aussi, grosse flemme, mais que ça vibre dans mon sac (= portable enterré sous les couches sédimentaires de ma vie) et c'est: dilapidation de gestes, excavation de ce que mon sac peut contenir de plus stupéfiant (là, une boîte de Ricoré, car j'en avais plus et m'interdis les sacs en plastique qui ruinent ma démarche car développement durable, green power, préservons-nos-terres-attitude;  ici, cinq briquets, peur de manquer, cela dit, dans notre bon comté d'Ector, si t'as pas de feu pour allumer le barbeuc, ben t'es plus rien socialement.), petits tics de crispation inquiète "bon Dieu, faites que j'aie le temps de décrocher, faites que j'aie le temps, et si c'était graaaaaave? Et si c'était la valise RTL??", soupir de satisfaction exagérée lorsque je le retrouve.

S., quand elle mobile, on peut se demander s'il y a réellement un correspondant au bout du fil, tant elle est discrète. Elle sourit en sussurant sensuellement dans le téléphone qui, séduit, la passe automatiquement en "appel gratuit". Jamais S. ne se fera surprendre à hausser la voix pour dire des choses comme "mais OUI, enfin, OUI je pense au camembert!! OUI, je prend AUSSI le pain, baguette ou boule?? Décide, m****!  P***** qu'est ce que t'es chiant toi à la fin!!"..(en même temps, chez nous, près d'Odessa, on est très peu fourni en camembert, alors un peu d'empathie pour ce presque drame dominical).

S., si elle est malade, reste aussi délicate qu'une fleur pure, gelée dans le givre cristallin (classe, hein?): elle a certes le regard fébrile (moi, les yeux injectés de sang, qui coulent), un diadème de perles de sueur en haut de son front altier (moi, une pieuvre gluante et molle -mes cheveux- posée sur le haut du crâne), une voix fragile (moi un ronflement striduleux dans mes bronches qui miaulent). Elle, tout cool, moi aussi, tout coule. On ne parlera pas du nez, à cause de la parenthèse qui s'ensuivrait.

Quand elle prend son café, elle est toute entière dévouée à sa copine qui vient de la rejoindre, vraiment, même si copine vient causer de quelque chose de morne (z'ont pas pris Junior à la crèche, par exemple. Fais moi penser à passer chez le fromager, par exemple), elle console, répare, et ne regarde pas la  bombe humaine personne de sexe assurément masculin ascendant viril à l'autre bout de la terrasse. Cette apparition immanquable sur laquelle je me dévisse le cou, dans une pose au somment de l'élégance, dont, tiens, je ne parlerai pas.

(Ah oui, dans le Moyen testament, ils disent aussi que "un mari pour la vie, deux yeux pour la vue", ce qui signifie que ce serait offense à Dieu que de ne pas utiliser ses yeux pour mater envisager l'existence de toute cette masse humaine de sexe opposé).

Et quand elle se lève, S. te renvoie à peu près au ras des pâquerettes, en te donnant à voir le spectacle superbe de Féminité Absolue en marche vers l'inconnu, genre. Alors que moi je vais rentrer à Odessa avec mon cheval.

Voilà pour la session café. Quand je ne serais plus plongée dans cet état de stupeur-charme-désarroi personnel-sidération, je tirerai des leçons de tout cela.

 

 

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