LOVA LOVA

Bientôt le mois de février. "Qu'est ce qu'on va bien pouvoir fourguer aux consommateurs, à mi-chemin entre soldes d'hiver, chandeleur et collections d'été? " se demandait le commerçant.

Par chance, dans le no man's land du premier trimestre surgit: la St Valentin. "La belle aubaine, se dit le commerçant, en voilà une occasion qu'elle est bonne" -et qui tombe bien, car il restait justement un stock d'objets en forme de cœur invendus à Noël, on se demande pourquoi-.

Pour ma part, je sèche scrupuleusement la St Valentin, vous vous en doutiez. J'aime pas l'idée qu'on doit impérativement être en couple ce jour là, sinon c'est purement et simplement la loose sentimentale. J'ai des drôles de copines qui passeraient leur soirée du 14 avec n'importe qui histoire de ne surtout pas paraître en reste. D'ailleurs je devrais employer le présent et non pas le conditionnel, vu qu'elles passent ce soir là accompagnées (donc inexorablement mal baisées au réveil le lendemain matin).

Non, c'est trop triste. Époux et moi, sommes très unis dans le boycott de ce truc, je crois qu'on ne l'a jamais fêté, même au début de notre relation (c'est pour cela que dure notre mariage: on est tombé d'accord tout de suite sur les Choses Qu'il Ne Faut Pas Faire Pour que le Mariage Dure).

Donc à quinze jours de la grande orgie cardiaque dans les vitrines, des offres incontournables (297 euros seulement pour le menu "amour et frissons" -forcément à base de gingembre, de champagne -parce que l'alcool ajoute de la souplesse au sentiment- et de choses qui se sucent, histoire de ne pas perdre de vue la dimension érotique de ce jour tendre), je vais, moi M., la grande prêtresse de l'Affection Durable, vous expliquer comment on s'en sort pour qu'un couple tienne le choc sur la durée.

(Notez bien qu'à aucun moment je n'ai dit : sans heurts).

Justement, parlons-en tout de suite: les disputes.

Très important, pour un vrai couple, de se disputer. Je suis pour la dispute débile, et pour le consensus autour des décisions importantes. Explications: mieux vaut déclencher un bon gros ouragan domestique pour "rien" (par exemple, après avoir vu la manière dont est rebouché le dentifrice) que s'étriper sur le nombre d'enfants qu'on désire, sur la religion, voire sur la passion pour les soirées football. Pourquoi donc? Parce que si ce type de chapitres fondamentaux ne sont pas l'objet d'un accord "immédiat", permettez moi de penser qu'à un moment, forcément, ce ne sera plus une dispute mais une cause de séparation.  Alors que le dentifrice mal bouché égayera vos soirées grâce à un petit intermède sonore, certes très distrayant mais sans conséquence durable.

Vous voulez un conseil pour rendre une dispute plus folklorique? S'il faut épargner les enfants, n'hésitez pas en revanche à en faire profiter le voisinage (je garde un souvenir merveilleux d'une amie de ma mère qui ouvrait la fenêtre exprès en hurlant "Vas-yyyyyyy, tout le monde va t'entendre!!!". Tout à fait hystérique, tout à fait italien. Génial. J'adore).

Les petites attentions. Bon, je vais être franche: j'y crois une seconde, pour faire plaisir, mais en réalité je trouve ça hyper exigeant et compliqué. Sauf si ce sont des attentions simples: préparer à dîner une fois par jour, c'est suffisant (hein? Oui, c'est ma petite attention). L'homme qui prodigue une gentillesse par jour est soit coupable, soit finira par dire un truc du style: "avec tout ce que je fais pour toi!" alors qu'on a rien demandé. De toutes façons, mieux vaut un gros diamant (enfin, une grosse émeraude dans mon cas) que 365 galets. (N'est-ce pas?).

La parité dans la répartition des tâches domestiques et ménagères. Attendez, je pars mourir de rire.

D'accord: je suis totalement ignorante de ce sujet pour cause de mariage avec un Spécimen Méridional (de la tribu qui pense qu'une éponge à vaisselle est un accessoire de la vie féminine au même titre que le sac à main).

La séduction dans le temps. De toute évidence, intimité, connivence et sympathie conjugale DOIVENT s'arrêter à la porte de la salle de bain. Non, on ne demande pas à son homme de nous aider à mettre un masque désincrustant spécial dos gras. Homme ne doit pas nous voir avec un quelconque masque, d'ailleurs. What happens in bathroom stays in bathroom.

Époux croit que je suis née sans problème d'épilation, que je suis naturellement manucurée et je ne vois pas où est le problème. (N.b: j'ai refusé sa présence en salle d'accouchement... je suis désolée mais celui qui ose dire "c'est le plus beau moment de ma vie" ment. Le plus gore moment de sa vie, le plus éprouvant (dans la mesure où Homme a combattu l'envie de gerber + tomber dans les pommes) moment de sa vie, à la rigueur. Mais beau, permettez moi de penser que cela tient de la psychopathologie, ou du sadisme. Époux m'en veut à peu près à mort, mais s'il avait été là, il m'en voudrait encore plus à mort).

La proximité. Oui, tant qu'à être deux, autant être ensemble. Les activités en commun sont le ciment de la vie de couple, sinon, ça s'appelle un mariage blanc. Pour autant, doit-on tout faire ensemble?

Personnellement, je ne crois pas que Un moins Un fasse zéro. Pas dans une équation sentimentale du moins. Époux et moi nous sommes entraînés mutuellement dans les sorties qu'on aime. Donc lui aux soldes textiles, (voire même au rayon linge de maison des galeries Haussmann), et moi aux matches de foot (voire: derrière les supporters du TFC). Et j'en ai conclu: mauvaise idée, il y a des trucs qu'il vaut vraiment mieux faire seul(e). On ne peut pas tricher toute la vie en laissant croire que "c'est sympa" de regarder onze ahuris taper comme des sourds dans un ballon rond sous les vivats des troupes.

De la même manière, cloisonner son cercle professionnel et le privé m'apparaît indispensable. Nul besoin d’inter-pénétrer ces espaces dans un souci de connivence, de super-intimité-cool-mélangeons-tout. Moi, je cloisonne.  Surtout depuis que j'ai pu noter la haute poitrine compétence des trois secrétaires de son service. Non, je ne veux pas connaître le contenu de ses journées, et vice Versailles, gardons nos secrets d'alcôve. (N.b: ça permet également de maintenir son potentiel "hautement draguable", ce qui est toujours sympa, sans compter l'aura de mystère qui planera autour de vous: "Est-ce que son mari ne serait pas un agent secret???? Haaaaan....").

L'admiration. Deal que je place, avec les années, quasiment tout en haut de ma conception du couple au long cours (bien que je le place textuellement tout en bas de ce post, mais le paradoxe est aussi un élément constructeur. Exemple: j'adore faire du shopping mais pas chez Castorama). Pour ma part, j'ai une réelle, constante admiration pour Époux, dont je pense qu'il est le plus brillant des hommes (avec Alain Juppé, et Papa). Cherchez bien, il y a nécessairement une qualité qui vous subjugue chez l'Homme...Oui? Parfait, mettez la sous cloche, cultivez-la et regardez la pousser. Aux alentours de soixante-dix piges, il y a de fortes chances que "sa loyauté" soit encore là, à l'instar de "sa puissance communicative", alors que "ses abdos de l'autre monde", j'ai des doutes.

Là dessus, je dois partir, il faut impérativement que j'aille m'occuper de ma pilosité (naturellement inexistante, oui, oui).

Soyez heureux.

 

Exemple de couple tout à fait uni. (Femme joyeuse, Homme avec joli  tricot = s'ils y arrivent, pourquoi pas vous?).