LES COPAINS, APRÈS.

Voilà, elle a eu lieu, notre soirée retrouvailles, en un mot: cool. Plein de copains se sont désistés au dernier moment, excuses bidonnées à mon avis, mais le comité restreint, ça a du bon vu qu'on a pas fermé le bec de la soirée, Blablabla intense, sur ce point je suis rarement en panne.

Cool, parce que le mot le plus lâché au moment M du rendez-vous c'était "Incroyable comme t'as PAS changé". Personne n'avait pris les 20 ans dans les dents de manière violente (peut-être les désistés, qui sait? Pour apporter la preuve du contraire, fallait venir, les absents ont toujours tort). Parce que sur les cinq garçons de l'assemblée (trois ex, le dernier est homo, ce n'est pas un joke, à l'époque du collège on s'ennuyait ferme, je rappelle qu'on passait vanilla ice à la radio), aucun ne m'a collé rétrospectivement la honte, et je les en remercie. Passées les premières minutes de collage de bises/ échange de bonsoir polis (on est ADULTES, courtois, oulala), fou comme les anciennes manières reprennent le dessus, d'où: Minute Philosophique. On ne change pas, on évolue. On ne fait que développer le germe de l'adulte qui sommeillait en nous, déjà, à 13-14 ans. On devient ce que l'on était (forcément un peu) de manière confuse. (Horreur à l'idée que je portais en moi le germe de la-dame-à-qui-on-donne-les-chèques-pour-la-cantine. Non, ça c'est plutôt une affaire de Germe Flemme Dominant, qui a pris le pas sur tellement d'autres germes, on va dire). Voilà.

Pas eu de groc' (ça m'ennuierait d'écrire gros connard). Pas eu de vie bousillée, hormis celles de deux absents partis très tôt, qu'on a évoqué avec tendresse. Pas eu de traumatisme irréversible, enfin disons, totalement irréversible même si j'ai appris que:

-Ex n°1 m'avait cocufiée avec Copine (absente au dîner, bien vu).

-Ex n°2 m'avait cocufiée avec MÊME Copine peu de temps après.

-Pote N°5 (pas Ex, fort dommage d'ailleurs, car très beau. Très très beau. Très très très beau ET assis en face de moi, youpi) a cocufié ma meilleure amie de l'époque avec MÊME Copine.

-Compréhension que Copine a été une vraie salope hyper gonflée, dans notre dos.

-Ex, alias Première Grande Histoire d'Amour (absent du dîner) a fini par épouser Celle Qui m'a Volé Première Grande Histoire d'Amour. Qu'il a donc bien agi puisque vingt ans après ils roucoulent encore. Ai vu leur photo, leurs enfants sont magnifiques, ils sont heureux à vomir des nuages roses, et sans amertume aucune je suis vachement contente pour eux. Au moins un cocufiage de fécond.

-Ex (un autre, pour qui vais-je passer?) à-qui-j'ai-brisé-le-coeur vend des avions à Monaco. Ah ouais? Ah. Que dire? On dit "voilà au moins une rupture d'utile", je suppose.

-Copine bécasse dont on disait avec la gentillesse de nos 15 ans qu'elle était "trop con, elle sera coiffeuse" parade justement à la tête de la moitié des salons de coiffure (franchise) de la côte, donc NE SE PORTE PAS MAL. Très cool et très sympa, en plus. Mariée à un bellatre de quinze ans notre aîné, ce qui amplifie la sensation de "bien ouèj".

-Moi, et là, hem, petit hiatus avec l'existence. Instant de solitude. Léger embarras. Merci les copains pour votre clairvoyance "Mais qu'est ce que tu branles fabriques dans une administration? Tu étais sérieuse en disant ça? Tu aurais pu aller tellement plus loin? T'en as jamais marre de faire ça?". Manifestement mon germe fainéante ne leur a pas sauté aux yeux plus que ça. (Je me cherche des excuses, I know, I know... Ils ont raison).

Bonne idée, cette soirée, on a réellement pris du plaisir à se retrouver, et on avait vraiment plein de choses à se dire, pas uniquement une rétrospective, non, des visions d'avenir ont pris forme. On s'est quitté en se promettant que la prochaine fois il ne faudra pas attendre 20 ans. Et qu'on irait chercher Copine-salope par les cheveux, pour qu'on s'explique quand même.

Si, et seulement si entretemps je n'ai pas entièrement remis à plat ma vie, et vécu une affreuse dépression.